Du 17 février au 4 avril 2008, Maan Asema, La position de la Terre, exposition collective avec Adel Abidin, Petri Eskelinen, Tommi Grönlund & Petteri Nisunen, Ikka Halso, Antti Laitinen, Janne Lehtinen, Ville Lenkkeri, Anni Leppälä, Liisa Lounila, Seppo Renvall, Heli Silojärvi, Kim Simonsson, Anna Tuori, et une project room avec Carolina Saquel, sur un commissariat de Paula Toppila & Sophie Kaplan.
L’exposition Maan Asema—La position de la Terre, organisée dans le cadre de 100% Finlande, rassemble les œuvres d’une quinzaine d’artistes et mêle photographies, peintures, dessins, sculptures, vidéos et installations. Très dynamique, notamment dans le domaine de la photographie, la jeune scène finlandaise est riche de découvertes et l’exposition du CRAC Alsace propose, aux côtés d’artistes déjà reconnus sur la scène internationale, de jeunes artistes qui exposent pour la première fois en France.
Le titre de l’exposition, Maan Asema—La position de la Terre* renvoie à la relation tour à tour humaniste, naturaliste, scientifique, physique, onirique et/ou intimiste, que les artistes, chacun à leur manière, fondent avec la terre, plus largement avec le monde.
Le paysage, la nature occupent une place très importante chez de nombreux artistes finlandais, toutes générations confondues. C’est ce dont témoignent tout particulièrement les oeuvres présentées dans cette exposition. Ce qui permet de reposer en filigrane la question, en ces temps de globalisation généralisée, de la persistance des caractères nationaux et d’une nécessaire influence de l’environnement immédiat. Davantage qu’un répertoire des déclinaisons artistiques possibles du paysage, l’exposition cherche à montrer comment celui-ci traduit et engage un rapport au monde dicté à la fois par des questionnements intérieurs, par un milieu naturel propice et par un contexte planétaire environnemental inquiétant (dont il s’en suit que la planète terre retrouve une place centrale qu’elle n’avait peut-être plus occupée depuis les grandes avancées scientifiques des siècles passés). Dans certaines œuvres de l’exposition, qui se situent dans une tradition romantique, le paysage naturel, qu’il s’agisse d’une vaste étendue (Silojärvi) ou d’un jardin domestiqué et secret (Leppäla), est le reflet d’un paysage de l’âme. Ailleurs, l’âme humaine se confronte à des mondes fantastiques (Tuori), peuplés de bêtes étranges tout droit sorties des sombres forêts de Finlande (Simonsson). D’autres fois, l’extra-ordinaire est davantage dicté par une vision catastrophiste ou pessimiste de la nature. Ainsi, dans les peintures de Lounila, le paysage est tellurique, et la nature, par son pouvoir de destruction, objet de fascination. Chez Halso, à l’inverse, c’est l’homme qui est le fossoyeur d’une nature qu’il tente pourtant de préserver. Dans nombre d’œuvres exposées, c’est l’individu qui se confronte au paysage, qui l’éprouve et s’y heurte. Parfois en des tentatives prométhéennes: creuser à mains nues un chemin dans la glace, bâtir une île (Laitinen), aspirer la neige (Abidin). D’autres fois, en tentant de se rapprocher du ciel pour finalement dire ‘l’acharnement du rêveur aux prises avec la pesanteur terrestre’**. Le lien à la terre et ses propriétés physiques se retrouvent encore dans des œuvres qui interrogent la façon dont l’homme, non seulement perçoit les phénomènes terrestres, mais aussi se perçoit comme appartenant à la terre, qui elle-même appartient à l’univers et régie des lois ‘démesurées’ et ‘phénoménales’ (Eskelinen, Grönlund et Nisunen). Enfin, dans une lignée humaniste, le point de vue de l’homme sur la terre est interrogé et regardé avec tendresse et parfois ironie par certains artistes (Renvall, Lenkkeri). À ce titre, la photographie de Lenkkeri, The world as we know it, qui montre un globe terrestre posé dans un couloir est symptomatique: elle pourrait bien être une nouvelle représentation de la terre et de sa place dans l’univers, faisant suite aux représentations d’un Copernic ou d’un Hubble; elle dit avec humilité et humour, tout à la fois la grandeur et la petitesse de l’homme.
* Inspiré d’un roman de Ranya Paasonen intitulé La position du soleil, 2006.
** Didier Mouchel, in Janne Lehtinen, Sacred Bird, éditions Hatje Cantz, 2005.